Société

Limitation des allocations de chômage : « Les CPAS risquent d’être surchargés »

Il y a une semaine, le nouveau gouvernement Arizona a annoncé un projet de réforme visant à limiter les allocations de chômage à 2 ans pour les personnes de moins de 55 ans. Un changement dans le but d’encourager les chômeurs à revenir sur le marché du travail. Mais l’annonce de ces mesures est loin de faire l’unanimité, notamment au sein des CPAS et autres structures d’aides sociales qui redoutent une arrivée massive de personnes dans leurs établissements ainsi qu’une charge de travail importante pour leurs employés. 

Image par Jana Schneider de Pixabay

Noémie Van Brabant, chef de service au CPAS de Namur, témoigne de ses inquiétudes : afflux de nouveaux bénéficiaires, surcharge de travail ou encore baisse drastique sur les aides sociales.

Comment percevez-vous cette limitation des allocations de chômage à 2 ans au sein des CPAS ? 

Nous en parlons beaucoup entre nous, employés, et nous trouvons cela assez alarmant et questionnant. La situation actuelle des CPAS n’est déjà pas évidente, notamment pour des raisons de sous financement, et à cela s’ajoute également l’arrivée massive de personnes en raison des crises migratoires consécutives. Alors même si la réforme n’a pas encore été officiellement votée, nous redoutons déjà les conséquences.

Quel impact concret cela pourrait-il avoir sur les CPAS et leurs employés ? Craignez-vous une saturation ?

Il y a une dizaine d’années, lorsque je travaillais à l’aide générale, il y avait déjà eu des décisions d’exclusion visant les chômeurs qui avaient provoqué des impacts négatifs pour les CPAS. Cela occasionne une charge de travail supplémentaire et importante pour les employés. Donc oui, c’est assez inquiétant car cette nouvelle réforme risque à nouveau d’amener beaucoup de gens dans les CPAS comme nous l’avons déjà vécu auparavant et provoqué une grosse surcharge de travail pour les travailleurs sociaux qui sont déjà débordés. Il faut savoir qu’une assistante sociale au sein de notre CPAS a en moyenne une centaine de dossier à gérer, et il s’agit seulement d’un chiffre indicatif étant donné que certaines personnes nécessitent d’un suivi intensif et d’autres non, donc ce qu’il risque d’arriver avec cet afflux de nouvelles personnes, c’est que les suivis vont durer moins longtemps de sorte à pouvoir traiter les demandes de tout le monde.

Quel est le public qui risque d’être le plus touché par cette réforme ?

Les personnes seules et les familles monoparentales risquent fortement d’être touchées si cette mesure est adoptée. Autre situation qui risque d’être délicate : dans un couple, si l’un des conjoints travaille et l’autre perçoit des allocations, ses aides risquent d’être réduites, les revenus du premier étant jugés » suffisants » pour le foyer. Dans des cas comme celui-ci, il n’y aura peut-être pas de demandes de revenus d’intégrations mais plutôt des demandes d’aides sociales.

Cette réforme va-t-elle augmenter la précarité et l’exclusion sociale, ou à l’inverse, pourrait-elle avoir un effet positif en incitant davantage les personnes à retrouver un emploi ?

Je ne sais pas vraiment déjà dire si cette mesure sera positive ou non, pour moi, ça dépendra de chaque cas. Pour les personnes en capacité de travailler, ça peut effectivement être un incitant positif pour qu’ils se reprennent en main. Mais pour d’autres en revanche, cela risque d’être plus compliqué… je pense notamment aux chômeurs de longue durée qui ne peuvent pas travailler pour diverses raisons et qui risquent donc de ne pas être épargnés et se retrouver dans une situation de précarité.

Avez-vous déjà pris des mesures spécifiques au sein de votre CPAS ?

Pour l’instant, je ne vois pas très bien ce qui pourrait être mis en place, mis à part le fait d’informer les gens en amont sur leurs droits et leurs possibilités à demander de l’aide. Pour les personnes qui seront estimées « en capacité de travailler », les CPAS feront un certain travail en amont avec eux, comme un job coaching, une formation… Il est important de rappeler que nous ne pouvons fermer les portes à qui que ce soit. Comme à leur habitude, les assistants sociaux recevront chaque personne et feront ensuite une enquête ainsi qu’une analyse de la demande pour déterminer si une aide ou des allocations peuvent être versées. Dans le fond, rien ne change dans la procédure de traitement., mais les réponses risquent d’être plus négatives qu’avant.

Comment allez-vous gérer la situation sur le plan financier ? 

Bart De Wever a parlé de financer un peu plus les caisses des CPAS via les communes, mais pour moi, c’est déplacer le problème au lieu de le résoudre. Le gouvernement va-t-il prévoir de l’argent ou des subsides spéciaux qui permettraient d’engager du personnel supplémentaire ? Est-ce que cet argent pourra vraiment faire face à cette marée de personnes qui risquent d’arriver dans nos structures ? Rien n’est encore bien clair…    

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