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L’alcool, un lien social à repenser 

Février, mois de la Tournée Minérale, est l’occasion idéale pour s’abstenir de boire. Ancien comitard à l’ULB, Dorian* a bien connu la culture étudiante festive. Aujourd’hui bénévole dans une association de réduction des risques, il nous a confié comment l’alcool a façonné sa vie sociale

« Il y a une illusion de lien social. Tu crois être entouré, mais au final, tu ne partages que des soirées d’ivresse. » insiste Dorian. Remettre en question son rapport à l’alcool ne concerne pas que les adultes. Dans le milieu étudiant, où l’alcool et sociabilité sont associés, sensibiliser à ce sujet est une nécessité. 

Une illusion de confort 

Dépeints comme le moyen de sociabiliser à l’université, les cercles sont rapidement introduits dès la rentrée étudiante des premières années. Dorian, n’ayant pas d’amis dans sa faculté, participe au baptême pour rentrer dans le cercle de psychologie. Il voyait cela comme une façon de s’intégrer socialement surtout en étant isolé à son arrivée. Même si l’alcool est partout, c’est surtout un facilitateur social et c’est exactement ce dont voulait Dorian. “On ne parle jamais de l’alcool, il est juste là. On boit et on fait tout en buvant.” se souvient Dorian. Il explique qu’il y a tout un rituel implicite autour de l’alcool dans le milieu étudiant mais jamais explicitement présenté comme un enjeu.  

Ce qui est un verre hebdomadaire devient rapidement un réflexe quotidien. Il ne fait plus que ça et s’en contente. Dorian raconte que l’un des pièges dans lequel il est tombé a été de croire qu’il devait « profiter à fond ». Il y a cette idée largement partagée que les études sont le moment idéal pour vivre pleinement sa jeunesse. Le risque est de ne pas penser aux conséquences ou même de les ignorer. Le confort social dans lequel il s’est mis ne l’a pas aidé sur ce point. Lorsqu’on est entouré de personnes dans la même situation que nous, il est difficile de sortir de la chambre d’écho.  

D’après l’OMS, l’alcool est responsable d’environ 25 % des décès chez les 20-39 ans.
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Ivresse à la prise de conscience 

Se réveiller seul à midi dans une autre ville après une soirée a été sa sonnette d’alarme. Même si cela a pris du temps, Dorian s’est vite rendu compte que les relations qu’il a tissées sont fragiles. « C’était pas du tout un vrai lien social, concrètement c’étaient juste des espèces de partenaires de “bourrance” quoi !”, affirme Dorian en riant.  La transition vers une vie sans alcool n’est pas simple. Il faut changer complètement son environnement, y compris ses amis. Il précise que le plus dur dans cette phase n’est pas tant de ne plus boire, mais plutôt la disparition de tout le contexte social qui l’accompagnait. Arrêter d’aller en soirée, perdre des habitudes bien ancrées et, surtout, se retrouver à devoir remplacer tout ce temps à ne plus faire la fête. Dorian se décide de reprendre ses cours et de s’y intéresser réellement. Comprendre l’alcoolisme mais surtout la banalisation de cette culture l’a poussé à agir.  

« C’était pas du tout un vrai lien social, concrètement c’étaient juste des espèces de partenaires de “bourrance”. »

Aujourd’hui, Dorian est engagé dans la sensibilisation sur les risques liés à l’alcool, avec l’association Modus Vivendi. Il informe, propose de l’aide, donne des formations et fait de la prévention en milieu étudiant. Pour lui, faire cela, c’est renouer avec soi-même, un lien qu’il n’avait pas pu créer avant. C’est pouvoir aider des personnes qui ont été comme lui, seules, et leur permettre d’avoir ce recul, sans honte et peur de s’isoler. “Aujourd’hui, je tends la main là où j’aurais aimé qu’on me l’ait tendue.” souligne Dorian. 

*Nom d’emprunt 

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